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Ce que j'en lis
12 juin 2014

Loin des mosquées, Armel Job

 

mosquee

"Turc grandi en Belgique, Evren achève à Cologne de brillantes études de comptabilité. Hébergé chez son oncle, ce garçon de vingt et un ans, encore chaste et au visage ingrat, s'éprend de sa cousine – la belle et sensuelle Derya. Rentré en Belgique, Evren fait part aux siens de sa décision : il va épouser Derya. Une délégation familiale se rend donc en Allemagne pour demander la main de la jeune fille. Mais les choses ne tournent pas exactement comme prévu : Derya éconduit Evren.

Outragés par cette humiliante fin de non-recevoir, les parents d'Evren cherchent un nouveau parti pour leur fils et choisissent Yasemin, une paysanne anatolienne de seize ans, vive et dégourdie, qu'Evren connaît à peine. Les noces ont lieu, et le jeune couple apprend peu à peu à s'apprivoiser. Jusqu'au jour ou Derya – dont Yasemin ignore l'existence – débarque à l'improviste en Belgique.

Quel secret cache le voyage de Derya ? Qui est véritablement Evren, ce grand garçon obéissant et en apparence si maladroit ? À quel jeu dangereux se livre Yasemin ? Quels rôles viennent jouer dans cette histoire René, voisin de la famille d'Evren et croque-mort de son état, et Marcel, son colocataire, attardé mental qui passe ses journées à visionner les enquêtes de l'inspecteur Colombo ?"

 

J'ai entamé ce livre avec une légère appréhension... Je craignais qu'on diabolise une fois de plus la religion musulmane, qu'on assimile leurs coutumes à de la barbarie, qu'une intrigue maladroite et mal documentée me gâche la lecture. Heureusement, on en est bien loin, malgré les thèmes abordés, dont celui si difficile à traiter du crime d'honneur.

Me voilà contente et soulagée! D'abord de manière un peu chauvine, puisque l'auteur est de ma province: c'était d'ailleurs ma motivation première pour le découvrir, challenge "C'est arrivé près de chez vous" oblige. Ensuite de façon plus classique, avec le plaisir d'avoir découvert un bon écrivain susceptible de me procurer d'autres très bons moments de lecture, en m'offrant en prime de beaux messages.

La plume d'Armel Job est subtile et sobre. Pas de longues descriptions ou de tirades interminables: en peu de mots, tout passe. J'admire toujours beaucoup les gens qui en sont capables. C'est tout un art d'être à la fois économe et percutant! J'ajoute qu'une bonne première phrase me cause toujours un bonheur immense, et ça ne loupe pas ici:

"En principe, un corbillard n'a jamais d'accident."

J'adore!

On suit tour à tour le parcours de différents personnages, dont les destins vont s'entremêler, aussi différents soient-ils. J'ai aimé la solitude forcée de René, la liberté sauvage de Derya, les calculs de Yasemin et l'innocence d'Evren. Chacun m'a touchée à sa manière. Ils sont terriblement attachants. Peut-être que ma nature de bisounours aurait préféré un flamboyant happy end, mais le message qui passe (je ne vous en dis pas trop) me paraît essentiel.

J'ai trouvé le discours des femmes extrêmement juste et crédible. Le rapport au corps et à la virginité, en particulier, et cette lutte entre le respect des traditions et l'envie de liberté... Derya, qui se sentait choyée dans son rôle de bonne fille, voit avec horreur sa famille lui tourner le dos pour une question d'honneur mal implanté. Ce foyer sécurisant devient une menace.

 

« Le SEXE : le mot, bien sûr, ils le prononçaient moins que le nom de Dieu lui-même, ils le vénéraient en secret. Ils l’honoraient, non comme une partie de ma personne, mais comme une divinité qui ne m’appartenait pas, qui n’était qu’un dépôt chez moi, le saint des saints aux hommes seuls réservé, qui échoirait à l’un d’entre eux le jour venu. Ils prétendaient m’empêcher de considérer mon corps tout entier comme mon bien propre, simple, bon, naturel. Ils m’avaient confisqué la part qui les fascinait et ils lui vouaient un culte ignoble.
Un porte-sexe, voilà ce que j’étais, juste un porte-sexe. »

 

Un très beau roman, à la source de nombreuses réflexions!

 

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